Médecin du RAID

lundi 2 décembre 2002.
 


Pour commencer voici une interview d’un medecin du Raid reproduit avec l’aimable autorisation du site
 

Médecin D’élite : Entretien avec le Docteur L., médecin au RAID

 
 


Anesthésiste-rénimateur, physiquement sur-entrainé, le Dr.L échange réguliérement sa blouse blanche contre la combinaison noire du RAID, le groupe d’élite de la police nationale.

Pour Caramed, le Dr.L a ouvert les coulisses de son métier où se mêle secret médical et secret défense..



Caramed : Pouvez-vous expliquer brièvement en quoi consiste votre métier ? L’exercez-vous à temps plein et devez-vous être disponible 24 heures sur 24 ?
 


Dr L : "...Protection, soins, sélection et gestion de crise..."
Le RAID est une unité constituée de 100 policiers triés sur le volet. Afin d’assurer une présence médicale continue, nous sommes quatre médecins contractuels à travailler au RAID. Nous y exerçons à temps partiel. Le reste de notre activité s’effectue dans un hôpital universitaire parisien.
Chaque mission est couverte par, au moins, un des praticiens du « Groupe Médical d’Intervention » (GMI). La rotation s’organise par groupe de jour. Nous essayons ainsi de limiter les périodes de relais. En pratique, chaque journée de 24 heures est couverte par au moins un médecin et ce, naturellement toute l’année.

Notre travail ?
Il s’articule autour de 4 grands axes :
 - la protection médicale rapprochée. C’est la mission prioritaire.
- les soins au quotidien (vaccinations, pathologies traumatiques de l’entraînement,etc.)
- la sélection d’entrée et le suivi médico-sportif : cela se fait un peu sur le modèle d’un club sportif de haut niveau ( copié sur ce qui se fait dans les clubs sportifs de haut niveau). Il s’agit de tester les aptitudes (visuelles, auditives, ostéo-articulaires) et d’évaluer la performance de chacun.
- Un rôle de conseil et de gestion de crise : dans la négociation et le profilage des situations et des individus ; dans l’interface avec les médecins traitants car une grande majorité des « forcenés » ont des antécédents psychiatriques.
 
 
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Caramed : Qu’est-ce qui a motivé le recours à un médecin spécifique au RAID ? Le GIGN ou d’autres unités étrangères le font-elles également ?
 
Dr L :
Cette association de médecins spécifiques à une d’une unité d’intervention est, me semble-t-il, unique au monde. Elle a débuté en février 1994, avec deux médecins seulement au départ.
 
L’idée initiale a été de pouvoir faire intervenir un médecin avec son matériel d’intervention complet et adapté, quelque soit le patient et quelque soit le lieu et les circonstances. Il permet d’assurer un niveau de qualité constant. Le RAID, qui a une compétence nationale, peut ainsi fonctionner en autonomie complète.
 
Les services de secours locaux, territorialement compétents, (SAMU, Sapeurs-Pompiers,.) ne peuvent pas toujours intervenir sur le lieu même de l’action d’une part pour des raisons de sécurité car ils ne sont ni formés, ni entraînés de manière spécifique, ni équipés de matériels de sécurité (gilet pare-balle, casque, etc.) leur permettant d’être un minimum protégé et d’autre part en raison de la confidentialité de certaines interventions. Chaque médecin du GMI doit d’ailleurs être habilité « secret défense ».
 
En revanche, les services de secours « classiques » ont un rôle important dans les situations stabilisées . Nous assurons la coordination sanitaire en évaluant avec eux et en temps réel les besoins objectifs sur chaque affaire. Les relations avec ces partenaires sont constamment excellentes. En effet, les médecins du GMI sont tous issus du monde de l’urgence et chacun comprend bien, me semble-t-il les impératifs et les contraintes de l’autre. S’occuper de la gestion de la sécurité sanitaire permet aux « Raiders » d’être totalement déchargés de cet aspect des choses.
 
 
 Quant au GIGN, il s’agit de médecins militaires qui sont affectés au Groupement de Gendarmerie de Satory (Yvelines)et qui assurent la permanence de soins pour les gendarmes et leur famille. Leur intégration à l’unité d’intervention est de fait plus « latérale ».
A l’étranger, il s’agit plutôt de secouristes ou de paramédicaux.
 
 
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Caramed :
Quelles sont les différences majeures, face à une médecine traditionnelle, du point de vue :
- technique (matériels ? type d’intervention ?)
- physique (entraînement ? sollicitation plus importante ?)
- psychologique (réactions au stress, implication personnelle, prise en charge et soutien psychologique)
 
Dr L : "Physiquement et psychologiquement très fort"
- pour le matériel, nous sommes équipés de deux types de matériels. Un pour la zone « chaude » grâce à un gilet tactique très fonctionnel qui permet de gérer au plus près de détresse éventuelle l’hypoxémie, l’hypovolémie et la douleur et un autre, pour l’arrière grâce à un véhicule spécial d’intervention (amené systématiquement sur le lieu de l’opération même par voie aéroporté). Il est similaire à un véhicule du SAMU (en plus discret.).
 
 En ce qui concerne la tenue, nous portons la même combinaison noire, une cagoule : seules différences, l’absence d’armes et l’inscription « médecin ». Le matériel est pris en charge financièrement par le Ministère de l’Intérieur qui, je dois le dire, a bien compris l’intérêt de cette prestation et nous assure des conditions matérielles de travail très satisfaisantes.
- physiquement, nous faisons du sport avec le reste de l’unité. Les disciplines pratiquées sont très variées : cela va des sports de combat, à la plongée, au parachutisme en passant par les sports collectifs. Il existe des entraînements techniques particuliers, destinés aux médecins : escalade, maniement d’armes, conduite rapide.Un certain niveau sportif est nécessaire pour suivre le groupe sur le lieu de l’intervention, quel qu’il soit. Au RAID, l’intégration se fait aussi sur un ring de boxe ou avec un parachute dans le dos.
- psychologiquement, il n’y a pas de formation particulière mais les gens sont sélectionnés en fonction de paramètres psychologiques très stricts. La stabilité est requise avant tout : c’est indispensable pour des interventions qui sont toujours à haute pression, avec un mélange médico-policier très particulier.
Il faut avoir une bonne expérience professionnelle de situations du même type ( bloc, SAU, SAMU) ; l’implication émotionnelle est inévitable mais on apprend à la gérer.
 

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Caramed : Quelles relations entretenez-vous avec les policiers ? Allez-vous au delà de votre rôle de médecin, sachant que la pression et les conditions d’exercice inhérentes à leur profession sont difficiles à gérer ?
 
Dr L : "Nos soins ne dépendent ni du grade ni du casier judiciaire"
Il a fallu apprendre à s’apprivoiser mutuellement. Nous débarquions en tant que médecins au sein d’un groupe très soudé et qui se connaît bien. L’intégration n’a pas toujours été facile : nous étions face à des compétiteurs appartenant à un service d’élite. Les choses se sont faites progressivement. Et je leur rends grâce de nous avoir accueilli finalement aussi bien.
 
Mais il ne doit surtout pas y avoir de confusion de rôle : nous sommes des médecins et pas des policiers.
 
 
Le but majeur était d’arriver à une cohésion de groupe, totale, à une intégration parfaite du médical et du policier. Nous devons donc savoir exactement ce que vivent les policiers, comprendre ce dont ils parlent, ce qu’ils vont être amenés à faire, avec les risques et les contraintes que cela comporte.
Il faut fournir les meilleures conditions de sécurité pour tout le mode, les soins les plus pertinents et rapides possibles. Je tiens à préciser que nos prises en charge médicale peuvent naturellement concerner aussi bien les policiers que les individus impliqués par l’action du RAID. Il y a la une dimension éthique et morale qui est, pour nous absolument fondamentale, incontournable. Nos soins ne dépendent ni du grade ni du casier judiciaire. Notre présence est de fait finalement une sécurité pour tout le monde. Je dis bien tout le monde !


Caramed : Quelles formations avez-vous suivies ?
 
Dr L :
-nous sommes deux médecins anesthésistes-réanimateurs et deux sont des « urgentistes » de très haut niveau. Nous avons tous les quatre plus de quinze ans de SAMU derrière nous.
-Je vous épargne le catalogue des autres Spécialités, Capacités et diplômes d’Université dont nous sommes de plus titulaires.


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Caramed : Quelles qualités une telle profession nécessite-telle ?
 
Dr L :
-la disponibilité
- l’ouverture d’esprit
-l’expérience professionnelle médicale de situations réellement critiques
- la capacité à vivre en collectivité
- un goût prononcé pour le sport ( à la fois pour le côté opérationnel et pour l’intégration).
-et surtout savoir rester à sa place !



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