Anesthésiste et Maire ?

jeudi 10 mars 2005.
 
Dans le cadre de notre galerie de portraits d’anesthésistes au parcours hors du commun, nous avons interviewé Philippe JUVIN, anesthésiste-réanimateur bien-sûr (PUPH à Beaujon) mais aussi Maire de La Garenne Colombes et Vice-Président du Conseil Général des Hauts de Seine chargé des Affaires Sanitaires et Sociales.

Gérald Kierzek :Pr JUVIN, bonjour. Merci d’avoir accepté cette interview sur les parcours atypiques parmi nos confrères. Pouvez-vous nous rappeler le vôtre ?

Philippe Juvin : Je ne sais pas s’il s’agit d’un parcours atypique ; en tout cas, j’ai toujours mené 2 carrières de front : médicale et politique. La carrière médicale a commencé par un internat de spécialité en anesthésie-réanimation puis un clinicat en réanimation et en anesthésie (à l’hôpital Bichat chez le Professeur DESMONTS). J’ai prolongé ma formation par un DESC de Médecine Légale et ai été rapidement chargé au sein de la faculté de Bichat de l’enseignement de la médecine légale, me donnant goût à l’enseignement. Côté recherche, j’ai passé une thèse de sciences sur le thème de la pollution. En ce qui concerne mon parcours politique, je me suis investi très tôt dans la vie de ma commune, comme conseiller municipal dès l’âge de 19 ans puis adjoint au Maire pendant mon internat. J’ai été élu Maire en 2001 alors que j’étais PH d’anesthésie. Je dois être l’un des rares maires d’une commune de cette importance (NDLR :24 181 habitants au recensement de 1999) à exercer encore une activité professionnelle à plein temps.

GK : Justement, comment avez-vous toujours pu concilier parcours politique et cursus médical ? d’abord en termes d’emploi du temps (vu notre formation et notre métier plutôt chronophages) mais aussi relationnels ?

PJ : J’ai commencé dès le début, dès la « P2 » et je ne me suis plus arrêté : externat, internat, Chef, PH et maintenant PUPH ! En parallèle, les responsabilités politiques ont suivi le même chemin. Je dois avouer que plus on avance, aussi bien en médecine qu’en politique, plus la tâche est « facile » : en effet, même si la charge de travail devient plus importante, on a la possibilité de déléguer ou de se faire seconder. En termes relationnels, il n’y a jamais eu de conflits avec des chefs de service, par exemple aux opinions politiques différentes des miennes ! J’ai néanmoins toujours fait très attention à « compartimenter » mes deux activités. Pas de prosélytisme bien-sûr. J’ai toujours mis un point d’honneur à ne jamais laisser s’immiscer ma vie politique dans mon métier, même si les gens étaient naturellement au courant.

GK : Comment réagissaient-ils ?

PJ : Intrigués surtout...mais mon engagement politique était surtout le reflet d’une envie de faire bouger les choses, un peu comme un engagement associatif. A partir de là, et que cela n’empiétait pas sur ma vie à l’hôpital, la perception ne pouvait être que positive.

GK : Pouvez vous nous donner une journée type de votre emploi du temps ?

PJ : J’essaye de rentabiliser au maximum mon emploi du temps ; 7 jours sur 7 et quasi 365 jours par an ! Je commence par la Mairie vers 7H15 juste avant d’aller au bloc où j’exerce mon activité clinique jusqu’en milieu d’après midi. J’enchaîne ensuite avec le Conseil Général jusqu’à 18 H pour terminer ma journée à la Mairie ! La boucle est bouclée vers 23H/Minuit...

GK : ...et vous continuez à prendre des gardes (NDLR : l’interview a été réalisée pendant une garde à Beaujon) ! A posteriori, pensez vous que le choix de votre/notre spécialité a été le bon ? Y-a-t-il une certaine cohérence entre l’anesthésie-réanimation et vos engagements publics ?

JV : Je le pense, oui. J’ai choisi l’anesthésie-réanimation par goût de l’efficacité et du travail en équipe, un peu comme en politique. J’ai un mode de fonctionnement cartésien et plutôt binaire, avec des décisions rapides à la clé. Mes choix ou mes thèmes de recherche sont de plus très orientés santé publique et donc au carrefour de la « res publica » et de la santé : thèse de science sur la pollution, DESC de médecine légale,...en tout cas je n’ai pas de regret sur ma spécialité !

GK : Comment voyez-vous la suite de votre parcours sans faute ?

PJ : Je ne tire pas de plans sur la comète. Je n’ai jamais eu de plan de carrière mais ma carrière s’est faite de rencontres, aussi bien à l’hôpital qu’en politique. C’est ainsi que je suis devenu Maire en 2001 alors que ce n’était pas forcément inscrit comme cela au départ ! Tant que je peux concilier mes activités, je continue.


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